Réguler ses émotions, c’est pas du yoga sous perfusion

On vous dit souvent qu’il faut “gérer” vos émotions. Traduction : ne pas déranger. Rester poli·e. Respirer. Sourire, même si vous avez envie d’envoyer tout valser.


Problème : ça ne marche pas.
On n’est pas des robots.
On ressent, parfois fort. Et si vous ne savez pas quoi faire de vos émotions, ce sont elles qui vont décider pour vous.
Alors non, l’idée n’est pas de tout contrôler.
Mais d’arrêter de se faire embarquer.
Réguler une émotion, ça s’apprend. Et ça commence par quatre réflexes simples. Pas confortables, mais puissants.

1. Écouter ce qui se passe avant de vouloir faire taire

Première étape : arrêter de fuir.
Ce n’est pas parce que vous l’ignorez que l’émotion va disparaître. Spoiler : elle ne disparaît pas. Elle attend juste le moment où vous serez à bout pour revenir en force.
Commencez par l’écouter. Ça veut dire quoi ? Repérer les signes physiques : gorge qui se serre, estomac qui cogne, tension dans les mâchoires.
Le corps parle avant les mots. Si vous vous habituez à l’écouter, vous prendrez une longueur d’avance.
Vous sentez que ça monte ?
Ne passez pas en force.
Pas besoin d’en faire une scène. Mais arrêtez de faire comme si de rien n’était.
Juste : notez que c’est là.

2. Nommer l’émotion au lieu de dire « je suis pas bien »

“Ça m’énerve”, “je suis à cran”, “j’en peux plus” — c’est vague. Trop vague.
Si vous voulez vraiment réguler une émotion, vous devez la nommer précisément. Sinon, vous restez bloqué·e dans le flou.
Ce n’est pas pareil d’être en colère, frustré·e ou trahi·e.
Pas pareil d’avoir peur ou de se sentir impuissant·e.
Chaque mot est un outil.
Moins vous mettez de mots, plus l’émotion vous embrouille.
Nommer, c’est reprendre du terrain.
Ça ne la fait pas disparaître, mais ça la rend gérable.
Et surtout : ça vous évite de tout mélanger.
Colère déguisée en tristesse, honte déguisée en fatigue, etc.
Soyez précis·e. C’est là que la régulation commence.

Comprendre ce que ça vient toucher (et ne pas confondre émotion et réalité)

Une émotion, c’est une alerte.
Elle vous dit : “Quelque chose ne va pas.”
Elle ne dit pas que vous êtes nul·le, ni que tout va s’écrouler.
Elle dit : regarde.
Colère ? Une limite franchie.
Peur ? Un danger, réel ou imaginaire.
Tristesse ? Une perte.
Honte ? Vous vous sentez exposé·e ou jugé·e.
Demandez-vous :
Qu’est-ce que ça touche chez moi ?
Quel besoin n’est pas respecté ?
Qu’est-ce que j’essaie de protéger ?
Et ne cherchez pas à “positiver”. Juste à comprendre.
C’est pas de la psycho de comptoir, c’est de l’hygiène mentale.

Agir (mais pas comme un buldozer)

Une fois que vous avez écouté, nommé, compris : il reste une question.

Qu’est-ce que j’en fais maintenant ?

Et là, stop : agir ne veut pas dire exploser, faire un grand discours, ou envoyer un mail trop long à votre N+1.

Agir, c’est prendre une décision en lien avec ce que vous ressentez.

  • Dire non.
  • Prendre l’air.
  • Poser une limite.
  • Pleurer seul·e si c’est ça qui fait du bien.
  • Ne rien faire mais noter que “là, il s’est passé un truc”.


Vous n’avez pas besoin de transformer chaque émotion en action spectaculaire.
Mais si vous ne faites rien, elles s’empilent. Et un jour, c’est la goutte de trop.

Réguler, ce n’est pas être calme tout le temps.
C’est savoir quand ça monte, comprendre pourquoi, et choisir ce que vous faites avec ça.
C’est être vivant·e, mais pas débordé·e.
C’est être sincère, mais pas en vrac.
C’est être émotionnel·le, sans être à la merci de ce que vous ressentez.
Et comme toute compétence, ça s’apprend.
À condition de sortir de la caricature du “cool en toutes circonstances” et d’oser vous regarder en face.
Vous êtes pas une machine.
Vous êtes pas non plus une cocotte-minute.
Entre les deux, il y a un espace. Et c’est là que vous pouvez apprendre à respirer autrement.en rond